« Ce stérilet m’a gâché la vie », raconte Cécilia, une Haut-viennoise de 37 ans. En 2012, deux ans après la pose du stérilet hormonal Mirena®, la jeune femme a été prise d’une violente crise d’angoisse. « Et ça a continué quatre ans.J’étais prise de tremblements soudains, de sensations de chaud-froid, de nausées. J’étais en dépression. Les médecins parlaient de problèmes psychosomatiques »
Anxiolytiques, acupuncture, sophrologie… Cécilia a tout tenté. « Je cherchais des solutions partout sans comprendre ce qui m’arrivait. En 2015, j’ai découvert sur un forum des liens possibles entre Mirena et crises d’angoisse. » La mère de famille fait retirer le dispositif intra-utérin (DIU) et passe au stérilet en cuivre. « En peu de temps, plus rien… J’ai retrouvé mon état normal ! »
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Ces effets indésirables, Cécilia dit n’en avoir pas entendu parler. La plupart est pourtant clairement indiquée dans la notice d’utilisation. Alors sont-ils sous-évalués ? Ou les femmes sont-elles mal informées ? Depuis début mai, de nombreuses utilisatrices du stérilet Mirena font part de leurs expériences négatives. Un groupe Facebook, « Stérilet Vigilance Hormones », a vu en quelques semaines le nombre de ses membres exploser, passant de 200 à 13.500.
Face à la polémique et l’augmentation du nombre de signalements, une réévaluation des effets secondaires est en cours par les agences européenne et française du médicament.
« On ne m’a rien dit sur d’éventuelles conséquences, s’étonne Amélie, 26 ans, de Limoges. J’avoue ne pas avoir consulté la notice, qui a été jetée par mon gynéco tout de suite après l’ouverture de l’emballage. » Amélie a pris vingt kilos en un an et décrit « une irritabilité et une fatigue extrême, des maux de tête, des crises de larmes ». Il y a dix jours, elle a fait enlever le stérilet par une sage-femme : « un soulagement ».
Ma vie était devenue un enfer : je ne pouvais plus sortir de chez moi, plus conduire, plus aller chercher mes enfants à l'école, faire les courses...
Estelle, 39 ans (de Brive)
D’autres témoignages recueillis en Limousin font part de « vertiges et migraines » pour Magalie, 24 ans ; « d’acné sur le visage et le cou », de « perte de cheveux conséquente », de « sautes d’humeur », pour Sylvie, 53 ans ; ou encore d’un kyste ovarien pour Margaux, 24 ans.
Combien d’utilisatrices sont-elles concernées ? Dans la notice du Mirena, le laboratoire Bayer indique que les maux de tête sont par exemple très fréquemment observés « chez plus de 10 femmes sur 100 ». Ou encore que la dépression, la baisse de la libido, les nausées, l’acné, l’hirsutisme (augmentation excessive des poils) sont fréquents « chez une à 10 femmes sur 100 ».
« La parole libérée »
Les patientes se plaignent-elles alors qu’elles devraient savoir à quoi s’en tenir ? Beaucoup pointent du doigt un défaut d’explications. « On vous présente ce stérilet comme la solution miracle. Il n’y aura plus de saignements, plus de maux de ventre. Mon problème, c’est qu’on ne me propose pas d’alternative », regrette Sophie, 46 ans, qui doit s’accommoder d’une prise de poids de dix kilos.
Les femmes atteintes de certaines pathologies où le DIU hormonal est prescrit à visée thérapeutique, et pas seulement contraceptive, se sentent doublement pénalisées. « Je souffre d’endométriose. Mais le remède était finalement pire que le mal. Quand j’ai dit que je ne le supportais pas bien, j’ai eu le sentiment de ne pas être entendue », explique Virginie (*), 44 ans.Ces difficultés ne sont pas nouvelles. « J’ai des retours négatifs depuis deux ou trois ans », explique une sage-femme de Limoges, une profession habilitée à poser ou retirer des DIU depuis 2009. « Là, la parole s’est libérée. On a dit aux femmes que le Mirena était ce qui leur fallait. Beaucoup d’entre elles, c’est vrai, en sont ravies, mais il est nécessaire de s’adapter à chaque patiente et de les écouter quand ça ne va pas. »
(*) Prénom modifié.
La majorité des utilisatrices salue les bénéfices
On les entend moins, mais des femmes enchantées par le stérilet hormonal, il y en a aussi beaucoup. A la suite de notre appel à témoignages, Cindy, de Limoges, nous a écrit pour indiquer n’avoir « jamais rencontré le moindre souci depuis plusieurs années ».
Isabelle (*), 37 ans, infirmière anesthésiste, ne tarit pas d’éloges sur cette contraception adoptée en 2010. « J’ai eu quelques désagréments les six premiers mois. Depuis, c‘est du bonheur, je n’ai plus de règles et je vis très bien avec. »
Les résultats d'une réévaluation attendus en juin
Si une réévaluation est en cours par l’agence européenne du médicament, notamment parce que certains effets secondaires, comme l’anxiété, les vertiges, la fatigue, l’irritabilité, ne figurent pas dans la notice, « à ce jour, au regard des données disponibles, l’augmentation et la nature des déclarations ne remettent pas en cause le rapport bénéfice/risque de Mirena, qui reste positif dans ses indications actuelles », indique l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) dans un communiqué du 12 mai 2017.
Dr Loum, gynécologue à la Polyclinique de Limoges : « Pas d’afflux de patientes »
Comment fonctionne le stérilet Mirena® ?
« C’est un dispositif placé dans la cavité utérine, utilisé comme contraceptif mais aussi pour traiter des ménorragies fonctionnelles, c’est-à-dire des saignements abondants. Il libère petit à petit, pendant cinq ans, un progestatif, le lévonorgestrel. Celui-ci a pour effet d’épaissir la glaire cervicale et d’empêcher le passage des spermatozoïdes. Il entraîne aussi une atrophie de l’endomètre et parfois l’absence d’ovulation. »
Les effets secondaires sont-ils connus ?
« Oui, il y en a de très fréquents, comme les maux de tête ou la modification des saignements dans les premiers mois qui suivent la pose. L’arrêt des règles est aussi un effet secondaire, même s’il est généralement perçu comme un avantage. La prise de poids, les nausées, les kystes ovariens peuvent aussi survenir. L’humeur dépressive, la perte de libido, la nervosité, l’acné sont plus rarement observés. On déconseille d’ailleurs ce stérilet à celles qui, à l’adolescence, ont été sujettes aux problèmes de peau. »
Est-ce que ce mode contraceptif entraîne plus de troubles que d’autres méthodes ?
« Non, je ne le pense pas. Chaque méthode est plus ou moins bien tolérée en fonction de la personne : ce qui marchera très bien chez une femme ne sera pas du tout supporté par une autre. Dans ma pratique professionnelle, je n’ai pas l’impression qu’il y ait plus de souci avec le Mirena. J’en ai retiré un, récemment, sur une patiente qui était gênée par une chute de libido, mais c’est loin d’être régulier. Je n’ai pas d’afflux actuellement de patientes qui me demandent de leur enlever leur stérilet hormonal. »
Hélène Pommier