Comment attirer les médecins dans les déserts médicaux ? La question taraude les pouvoirs publics et les politiques depuis longtemps. Des mesures ont été mises en place, des expérimentations tentées, des incitations financières… Quelles solutions et pistes pour le Cantal ?
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Attirer les jeunes médecins diplômés
Pour pallier le départ des généralistes cantaliens en retraite, le Département et le conseil de l’Ordre des médecins draguent les futurs médecins. Au Département, l’organisation d’activités encadrées pour faire découvrir aux futurs praticiens les atouts d’un territoire rural et leur donner des envies d’installation. À l’Ordre des médecins, le côté professionnel et les informations sur les dispositifs possibles et autres incitations financières à l’installation, comme le détaille son président Jean-François Collin.
« La majeure partie du Cantal est située en Zone de revitalisation rurale, c’est-à-dire que les professionnels qui s’y installent sont exonérés de certaines taxes. L’Agence régionale de santé propose aussi des aides à l’installation dans les zones dites de déserts médicaux. Il est également possible pour un médecin de salarier un confrère en tant qu’adjoint, remplaçant, collaborateur… Enfin, la permanence de soins se fait désormais à l’échelle départementale et des astreintes, qui, du coup, reviennent moins souvent. »
Jean-François Collin (Président de l'Ordre des médecins du Cantal)
Un travail de longue haleine qui commence à porter ses fruits.
« Nous voyons les courbes des installations et départs en retraite s’inverser. En 2020 et 2021, ce sont cinquante-huit nouvelles inscriptions, en tant que libéral, salarié ou hospitalier, qui ont été enregistrées par l’Ordre, contre, dans le même temps, quarante-huit départs, soit pour un changement de région, une réorientation professionnelle ou à la retraite. »
Jean-François Collin
Mais pour autant, tout n’est pas réglé, concède le président du conseil de l’Ordre : « Il existe des disparités entre les territoires. »
Où sont les déserts médicaux en Auvergne ?
Les maisons de santé
« Le médecin de 2021 ne veut plus fonctionner comme le médecin de 1970 », lance Christian Montin, l’actuel vice-président en charge des solidarités de la Communauté de communes de la Châtaigneraie cantalienne, qui vient de lancer le chantier d’une nouvelle maison médicale à Maurs, à venir d’ici à 2023. La quatrième sur ce territoire, qui regroupe cinquante communes pour près de 22.000 habitants. La première a été réalisée à Saint-Mamet-la-Salvetat, qui a ouvert en 2019. « On voyait arriver le départ à la retraite des deux généralistes de la commune. Nous avons souhaité des conditions d’accueil tout à fait confortables pour l’accueil de nouveaux médecins. Et le fait d’avoir mis en place la maison de santé nous a permis de les garder. » Trois ans plus tard, la structure réunit trois jeunes femmes généralistes et une dizaine d’autres professionnels de santé (kiné, ostéopathe, podologue, infirmières…). Depuis, une autre maison de santé a ouvert ses portes au Rouget, même si, pour le moment, elle n’a pas de médecin, « mais ça va venir », assure l’élu. Des travaux sont en cours à Laroquebrou et des projets sont à l’étude à Lafeuillade-en-Vézie et à Lacapelle-del-Fraysse.
Le salariat des généralistes
C’est l’une des solutions avancées par Sébastien Prat, médecin généraliste âgé de 29 ans à Laroquebrou et patron des communistes dans le Cantal, qui offre un avantage incomparable : « Les médecins salariés ont des congés payés, disposent d’une protection sociale et gagnent en confort de travail. » Ce salariat dans un centre de santé leur permet également de consacrer 100 % de leur temps aux soins, puisqu’ils n’ont pas en charge la gestion administrative, fiscale ou comptable de leur cabinet.
« Il existe depuis très longtemps des médecins SNCF. Le Département de la Saône-et-Loire salarie des médecins dans des centres de santé, la Communauté de communes du Grand-Figeac emploie des généralistes qui interviennent un à deux jours par semaine dans les zones blanches. »
Sébastien Prat (Médecin généraliste installé à Laroquebrou)
Grâce à la lignée des docteurs Maurs, ce village du Cantal ne s'est jamais mué en désert médical
Les maîtres de stage
Sébastien Prat est convaincu des bienfaits d’un stage de six mois pour les internes à effectuer sous la tutelle d’un maître de stage. « On voit que les cabinets qui prennent des internes, ce sont eux qui arrivent à avoir des remplaçants et à attirer des jeunes dans le département. C’est stimulant sur le plan professionnel, car nous sommes dans l’échange permanent. » Le jeune généraliste exprime un sentiment d’abandon :
« On laisse les collectivités et les médecins sur place lutter seuls contre les déserts médicaux. Il faudrait un service public de la médecine générale et de l’offre ambulatoire. Il manque une vision globale sur comment on aménage un territoire en médecins. C’est une responsabilité de l’État de former plus de médecins et de mieux les répartir sur le territoire. »
Sébastien Prat
Pierre Raynaud et Emmanuel Tremet
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