Maisons "France Santé" : l'ambition d'un Premier ministre et les réserves de deux soignants

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Une maison de santé en Haute-Vienne •© France tv/ Cecile Descubes
Publié le15/09/2025 à 17h28
L'annonce de la création d'un réseau de 5000 maisons "France Santé" d'ici à 2027 fait réagir les soignants. Jean-Christophe Nogrette, secrétaire général adjoint du syndicat MG France, et Martial Jardel, médecin généraliste et cofondateur de l'association "Médecins solidaires", émettent un certain nombre de réserves.
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Notre politique de confidentialité Le 13 septembre 2025, lors de son premier déplacement officiel à Mâcon (71), le Premier Ministre, Sébastien Lecornu, a dévoilé un projet ambitieux : la création d'un réseau de 5000 maisons "France Santé" d'ici à 2027. Ce plan, présenté comme une priorité nationale, vise à garantir un accès aux soins à chaque français "à moins de 30 minutes de chez soi", surtout dans les déserts médicaux.
Le premier ministre a insisté sur l'urgence de répondre aux besoins des territoires ruraux, ou l'accès aux professionnels de santé est souvent limité. Le réseau "France Santé" serait calqué sur les maisons "France Service" qui proposent un guichet unique pour toutes les démarches administratives, là où les administrations ont disparu.
Une ambition louable, mais des questions pratiques
Martial Jardel, médecin généraliste en Haute-Vienne et cofondateur de l'association "Médecins Solidaires", se montre prudent. Pour lui, le projet des maisons "France Santé" repose probablement sur l'idée d'un label qui serait attribué à des structures existantes ou nouvelles, comme les maisons de santé pluridisciplinaires (MSP) : "Il ne s'agirait pas de créer 5000 structures, ça n'aurait pas de sens".
Il exprime des réserves sur la faisabilité du projet : "Créer un tel réseau en deux ans, me semble très ambitieux, voire irréaliste, sans une coordination efficace et des financements conséquents."Il insiste sur l'importance de mobiliser "l'énergie médicale" existante dans le pays, tout en notant que les professionnels de santé, bien que motivés, sont souvent "épuisés par un système qui demande beaucoup de résilience".
Pour martial Jardel, la réussite du réseau "France Santé" dépendra de la capacité du gouvernement à proposer des moyens concrets pour transformer cette ambition en réalité.
Un projet flou et des risques de dérive
Jean-Christophe Nogrette, secrétaire adjoint de MG France et médecin en Haute-Vienne, se montre plus critique, voire sceptique. Pour lui, les maisons "France Santé" risquent de n'être qu'un guichet d'orientation, comparable aux maisons "France Service" pour les démarches administratives, offrant un "service dégradé", sans réelle valeur ajoutée.
Les maisons de santé pluridisciplinaires remplissent déjà ce rôle de coordination et de proximité. Ce n'est pas la peine de faire un système en plus"
Jean Christophe Nogrette Sécrétaire général adjoint de MG France
Le médecin Haut-Viennois pointe également du doigt plusieurs risques. Il met d'abord en garde contre le salariat des médecins dans ces structures : "Un médecin salarié, assuré de son revenu, pourrait se limiter à 10 patients par jour, ce qui serait insuffisant dans un contexte de pénurie de médecins généralistes".Il estime que le salariat n'est pas une solution adaptée à la crise actuelle, où la médecine générale nécessite un suivi des patients sur le long terme.
Jean Christophe Nogrette estime aussi qu'une maison de santé ne se résume pas à des bureaux occupés par des médecins, mais surtout à un véritable projet de soins collaboratif construit entre tous les professionnels présents : "Dans un territoire vieillissant comme le limousin, il faut répondre aux besoins spécifiques des patients, comme ceux atteints de maladies graves dans des zones reculées. Une vraie coordination est nécessaire pour libérer du temps pour les généralistes. Certains soins peuvent être pris en charge par des infirmières, sans pour autant mettre les patients en danger. Il faut établir des protocoles très précis sur le long terme".
Selon le site officiel du gouvernement, le réseau serait construit en densifiant celui des maisons « France santé », des structures pluri-professionnelles introduites dans le code de la santé publique en 2007. Le Premier ministre a indiqué viser 5 000 maisons en 2027, alors qu’elles étaient au nombre de 2 501 au 31 décembre 2023, selon les données du ministère du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles. Cette « priorité absolue » pour le Premier ministre devra être inscrite dans les projets de budgets de l’État et de la sécurité sociale pour 2026.
france 3 article https://france3-regions.franceinfo.fr/nouvelle-aquitaine/haute-vienne/limoges/maisons-france-sante-l-ambition-d-un-1-ministre-les-reserves-de-deux-soignants-limousins-3217190.html